Voilà qu’il me parait urgent de reprendre mon clavier, non pas pour jouer quelques notes, mais bien pour composer des mots de paix.
Tout d’abord, merci aux menaces de guerre, merci à la poignée d’êtres humains (le sont-ils vraiment?) qui conduisent notre docile espèce dans leurs projets de domination, jouant sur la peur. C’est bien grâce à eux et aux contractions qu’ils génèrent sur notre conscience que nous avons une chance de naitre à autre chose, à la suite de notre histoire… d’amour.
J’entends ce matin parler « d’effort de guerre ». Y a-t-il un quelconque effort à fournir pour faire la guerre ? Nous la perpétuons, en premier lieu en nous, depuis des millénaires. Un peu de sincérité pour admettre que cela ne requiert aucun effort, mais plutôt la même douce déresponsabilisation qui nous berce depuis notre enfance, nous apprenant à désigner des bourreaux et à se clamer victimes.
Si nous devons fournir un effort collectif urgent, ne s’agirait-il pas plutôt d’un « effort de paix » ? Cette paix dont tout le monde se revendique, mais dont bien peu tentent d’arpenter les chemins audacieux.
La paix n’est pas la trêve entre deux guerres, mais bien l’art de désamorcer une à une toutes les raisons qui nous pousseraient sur un champ de bataille. C’est un art qui est tout sauf passif. C’est un art de l’action, de la créativité, de la douceur et de la fermeté.
Sans doute ces mots ne parviendront-ils pas à se frayer un chemin dans la compréhension de tous. Je les adresse, dès lors, essentiellement à ceux qui choisissent de pouvoir les entendre : mieux que de fouler la route des arguments et des raisonnements, rassemblons-nous et désertons activement tout champ de bataille. Si personne ne s’y rend, la guerre n’existe que dans les fantasmes de ceux qui s’en nourrissent.
La guerre nous rejoint ? Acceptons-la et inventons des solutions de résistance non violente. La vérité, c’est que personne ne veut combattre, mais beaucoup ont peur de mourir. Quand on a peur de mourir, on est hautement influençable et on peut tuer. Et il est si facile de stimuler la peur d’un être humain endormi, qui a passé sa vie à refouler ses blessures d’enfance. Il est si facile de l’entrainer sur des récits partisans et de lui fournir, clé sur porte, tous les arguments pour lui faire accepter la nécessité de la violence. Il répètera ces arguments et prendra les armes parce que, même ça, c’est plus facile que de choisir le chemin le moins fréquenté : celui de la paix.
La paix. Un grand mot. Parlons-en concrètement. Voici ce qu’on peut préconiser pour notre grand « effort de paix » collectif, dans un programme d’urgence :
- Apprendre à faire la paix en soi, ce qui requiert un travail personnel de consolation de nos blessures d’enfance. Travail incontournable pour passer au point 2.
- Se rassembler, en tant que constructeurs de la paix, et coconstruire rapidement une résilience concrète. Pour ce faire, se retrouver en petits groupes locaux avec pour objectif principal d’apprendre la paix ensemble, de manière accélérée, vu l’urgence, mais aussi de se déconnecter au plus vite de toute dépendance vis-à-vis d’un pouvoir autoritaire, qu’il soit politique ou financier. Pour ne pas polluer ces groupes avec nos égos non consolés, le point 1 est un préalable.
- Apprendre à se reconnaitre mutuellement, en tant que constructeurs de la paix, et tisser un réseau de coeur, sans croix ni bannière. Les gens qui composent ce réseau mondial le savent déjà. Ils sont venus pour ça. Il faut maintenant renforcer les liens.
Petit cours accéléré pour apprendre la paix, seul et ensemble, et en faire une valeur d’attache :
- Apprendre à détecter en soi tout parti pris, accusation ou condamnation envers quiconque et se rendre compte que ces constructions d’opinion – même très « intelligentes » – se fondent sur des récits partisans conditionnés. Un récit partisan est le symptôme d’une guerre intérieure, dont souffre celui qui le propage.
- Apprendre à détecter toute forme de récit auquel nous adhérons par croyance ou confiance, envers la science, les médias, les experts, bref « les autres », et non par choix conscient autonome. Il n’y a en fait rien besoin de croire pour agir où notre coeur nous appelle.
- Se réunir en petit groupe et partager autour de nos difficultés à quitter le mode de pensée binaire et guerrier bourreau/victime, méchant/gentil, menteur/vériteur etc. S’entraider pour passer de la tension générée par la peur à l’intension de ce qu’on va construire ensemble.
- Ne pas oublier que se battre « contre » la guerre, c’est encore et toujours une guerre. La paix, c’est orienter son énergie volontairement « pour » construire le monde dans lequel on veut vivre, en cherchant à comprendre tous les points de vue.
Que tous les constructeurs de la nouvelle paix mondiale se manifestent, se rassemblent, et créent cette paix tant attendue. La paix n’arrive pas toute seule. Elle se crée par nos choix et c’est un travail. Ça ne peut être que maladroit au début, mais ce n’est pas une raison pour attendre. L’urgence est là.
Merci Jonathan, paix à notre monde… c est à mon sens le seul sens possible à la suite de la fraternité des humains, conscience et énergie dirigée en permanence vers le mieux vivre ensemble.
Le vizir et la Mort
Voici un conte arabe.
Il y avait une fois, dans Bagdad, un Calife et son Vizir. Un jour, le Vizir arriva devant le Calife, pâle et tremblant :
« Pardonne mon épouvante, Lumière des Croyants, mais devant le Palais une femme m’a heurté dans la foule. Je me suis retourné : et cette femme au teint pâle, aux cheveux noirs, à la gorge voilée par une écharpe rouge était la Mort. En me voyant, elle a fait un geste vers moi. Puisque la mort me cherche ici, Seigneur, permets-moi de fuir me cacher loin d’ici, à Samarcande. En me hâtant, j’y serai avant ce soir »
Sur quoi il s’éloigna au grand galop de son cheval et disparut dans un nuage de poussière vers Samarcande. Le Calife sortit alors de son Palais et lui aussi rencontra la Mort. Il lui demanda :
« Pourquoi avoir effrayé mon Vizir qui est jeune et bien-portant ? »
– Et la Mort répondit :
« Je n’ai pas voulu l’effrayer, mais en le voyant dans Bagdad, j’ai eu un geste de surprise, car je l’attends ce soir à Samarcande »